3 Supprimons l’élection présidentielle

La Révolution française s’est faite pour que notre Assemblée nationale soit le lieu de représentation du pouvoir « du peuple, par le peuple, pour le peuple ».
Rien, dans notre République, ne doit se situer au dessus de notre Assemblée nationale.
Or l’élection présidentielle court-circuite l’élection législative qui ne peut qu’avaliser, quelques jours après, le résultat de la présidentielle en envoyant une assemblée de la couleur du président élu renforçant plus encore son pouvoir. Assemblée ne représentant correctement aucune minorité.
Avec l’élection monarchiste du président de la République au suffrage universel, la France est une exception en Europe. En refusant l’élection du président de la République au suffrage universel et en proposant un président simple arbitre et garant des institutions, Pierre Mendès-France avait raison contre la dérive bonapartiste monarchiste du pouvoir personnel de de Gaulle, contre François Mitterrand et leurs successeurs.

Suppression de l’élection monarchiste présidentialiste du président de la République au suffrage universel.
Premier ministre chef du gouvernement, régime primo-ministériel. Président de la République simple arbitre, élu par 3/5ème de l’Assemblée, c’est-à-dire accepté par l’opposition.
Ce régime est d’essence bonapartiste, gaulliste, populiste, monarchique. C’est une « monarchie présidentialiste ». Le populisme monarchique puise sa légitimité dans cette particularité française, unique et scandaleuse en démocratie européenne, que constitue l’élection du chef de l’exécutif au suffrage universel. D’autres élisent un président mais qui n’est pas chef de l’exécutif ! Moment où le peuple se dessaisit dans un processus de servitude volontaire pour se livrer au pouvoir absolu d’un seul. Possibilité de choisir son monarque, cadre monarchiste. Le Parlement, qui légifère, et son émanation politique, le gouvernement et son Premier ministre, qui exécutent, deviennent de simples chambres d’enregistrement et de simples courroies de transmission du monarque tout-puissant. La légitimité populaire présidentielle concentrée sur un seul écrase la légitimité populaire législative dispersée sur 577 circonscriptions. Le Parlement et avec lui la démocratie qu’il incarne n’existent plus en réalité.
Ce d’autant qu’avec le quinquennat, l’élection de ces « petits » députés se fait trois semaines après, dans la foulée, de l’élection du « grand » personnage, du monarque. Le peuple ne va pas se déjuger à trois semaines d’intervalle. Sauf à se ridiculiser, il est condamné à donner une majorité au président. Les députés ne sont que des godillots du président.
Le fait de prétendre vouloir limiter les pouvoirs du président avec un tel mode d’élection est demi-mesure voire pure lubie.
L’élection du président au suffrage universel direct ne se conçoit que dans le cadre d’un régime présidentiel à l’américaine qui ne correspond ni à notre choix de régime parlementaire primoministériel ni à notre conception de la République.

La République, issue de la Révolution française, a rompu avec la monarchie puis conçu l’Assemblée nationale comme instance supérieure souveraine de la représentation du peuple.
L’élection du président de la République au suffrage universel, adoptée par référendum en 1962, a transformé la République en monarchie constitutionnelle. Le mandat ramené à cinq ans et l’inversion du calendrier républicain en 2002 ont aggravé le processus et, force est de constater que, la France est devenue une monarchie présidentialiste.
Avec cette élection présidentielle non républicaine, notre pays est beaucoup plus monarchiste que les royautés européennes.
Le Parlement est minorée par la présidence. La représentation et la légitimité présidentielles sont bien supérieures à la représentation et à la légitimité législatives. L’élection législative a perdu son sens et sa prépondérance et ne peut logiquement qu’avaliser la présidentielle renforçant encore la monarchie présidentialiste. L’Assemblée nationale n’incarne plus la représentation nationale souveraine et les minorités n’y sont guère représentées. Ce système fracture le pays sur des questions de personne au détriment du débat politique démocratique. Le pouvoir personnel bonapartiste en sort gagnant.
Système coûteux qui crée un doublon Elysée-Matignon. Dangereux en ce qu’il entraîne, le plus souvent, une rivalité au sommet de l’État, voire des cohabitations, entre le président et son Premier ministre, dans la conduite des affaires publiques.
En coulisse beaucoup se déclarent favorables à un système parlementaire primoministériel mais arguent du fait que l’on ne peut revenir en arrière, que les citoyens sont attachés à cette élection. L’honneur de l’engagement citoyen consiste aujourd’hui à dire qu’ils y sont attachés comme l’esclave à sa chaîne. Le citoyen est capable de le comprendre si nous sommes capables de l’expliquer. Pour une démocratie vivante, il convient d’affirmer notre opposition à cette élection.

L’élection présidentielle étant la clé de voûte des institutions de la 5ème République, il est quasi impossible de mettre en cause le présidentialisme et de prôner une 6ème République sans remettre en question l’élection du président de la République au suffrage universel.
Les législatives avalisent et renforcent la présidentielle qui la précède. Le pouvoir de dissolution bétonne l’édifice.
Pourquoi, alors que cette élection du président au suffrage universel, en tant que chef de l’exécutif, est une singularité française antidémocratique en Europe, ce mot d’ordre essentiel n’apparait pas ?

 Président de la République simple arbitre non élu au suffrage universel mais élu à la majorité des trois cinquièmes de l’Assemblée.
 Régime parlementaire primoministériel. Fin de la monarchie présidentialiste.
Le gouvernement émane des élections législatives, le président nomme Premier ministre le chef de la coalition gagnante et celui-ci nomme un gouvernement responsable devant l’Assemblée.

Dans un premier temps, il convient d’adopter le mode de scrutin mixte, scrutin proportionnel paritaire à correctif majoritaire et de revenir au calendrier républicain de la législative avant la présidentielle.
La conception de la République change. La République devient citoyenne par son mode de représentation réellement parlementaire mixte et la démocratie vivante qu’elle met en place. Et européenne par sa capacité à se fédérer au noyau central et à s’intégrer à l’ensemble européen.

Les Esprits Libres, mendésistes, n’étant pas encore majoritaires, soutiennent des mesures de transition comme la présidentielle en même temps que la législative, mieux, après la législative, et le scrutin au vote préférentiel pour cette présidentielle qui nous colle. Ce serait moindre mal et cela dépolluerait la législative en lui redonnant son autonomie.

Les Esprits Libres, tant que cette élection monarchiste existe, ne proposent pas de la boycotter. Il serait même bon qu’un candidat Esprit Libres se présente et propose la suppression de cette élection. Il convient de favoriser la gauche et l’écologie voire le centre, contre la droite et l’extrême droite. Il s’agit toujours de choisir le moins pire. Voire d’appeler à un vote blanc dans certaines circonstances. Chaque voix compte, surtout avec autant d’abstentions, et la voix des Esprits Libres doit compter au maximum dans toutes les configurations. Boycotter c’est offrir le pouvoir aux partis du système et à l’extrême droite.