4 Le scrutin mixte, paritaire proportionnel à correctif majoritaire

Les institutions démocratiques doivent principalement répondre à trois exigences :

1 - Représenter au maximum les minorités, courants et sensibilités, minorités politiques et diversités de la population. Obtenir la parité de toutes les assemblées ;

2 - La gouvernabilité, exigeant de concéder une majorité à la plus forte minorité, à la coalition la plus forte ;

3 - Rendre aisées les alternances.

Cela implique un système mixte de proportionnelle la plus intégrale possible au premier tour et un second tour majoritaire, sorte de prime au gagnant, garantissant une majorité. Parité, minorités fortement représentées, majorité conférée, alternances faciles.

Choix citoyen consistant à choisir et à doser la mixité, proportionnelle-majoritaire, dans un double souci : garantir une majorité et une stabilité gouvernementales et représenter au mieux les minorités sans mettre en cause le fait majoritaire. Ces deux curseurs activés, le système mixte, proposé ici, se situe au plus près de ces objectifs et préoccupations démocratiques.
Contestons l’appartenance des partisans de la proportionnelle et des partisans du majoritaire, même mâtiné d’une « dose » homéopathique de proportionnelle, à un projet citoyen de 6ème République dans la mesure où ils nient un pan essentiel de la démocratie, la nécessité d’une majorité et d’une stabilité pour les premiers, la représentation des minorités pour les seconds.
Dire qu’une 6ème République suivra la 5ème est une nécessité mais aussi une confortable vérité historique, une banalité, lapalissade, qui inéluctablement s’imposera un jour. Cela ne suffit pas à avoir raison ou à constituer un camp. Le FN a longtemps préconisé une 6ème République, LFI la préconise aussi, mais cela ne nous concerne pas pour autant. Prenons en compte les contenus citoyens des propositions constitutionnelles.

Critique du scrutin majoritaire
Il garantit la majorité mais au prix de la disparition de la démocratie et à l’avantage de l’uniformité, de la pensée unique, de la disparition des minorités non inféodées à un grand parti et du féodalisme bipartisan le plus souvent.
Scrutins majoritaire et proportionnel purs, ne sont que deux dangereux extrêmes d’une multitude de scrutins mixtes possibles. On ne peut réduire une palette de couleurs en dégradé à ses deux couleurs extrêmes.
Une fausse bonne idée de Gribouille-Montebourg-C6R consiste à se défausser en concédant une Assemblée élue au scrutin majoritaire dite « chambre majoritaire » et un Sénat à la proportionnelle dite « chambre d’opinion ». Nous serions là dans une 5ème bis avec la même assemblée qu’aujourd’hui.
L’Assemblée nationale est le lieu du débat démocratique et de la décision législative. Toutes les forces doivent être représentées ! L’Assemblée représente « le peuple » dans ses composantes et nuances et incarne le pouvoir de légiférer, le pouvoir de la plus forte minorité. Livrer cette Assemblée aux seuls partis « majoritaires » en supprimant le débat et les minorités est lamentable et inique. Le vrai débat serait relégué au Sénat devenant sorte d’Assemblée bis, passionnante mais impuissante. Que l’Assemblée soit la plus proportionnelle acceptable, proportionnelle autant que le fait majoritaire n’est pas en cause.

Critique de la proportionnelle intégrale
Comme l’enfer est pavé de bonnes intentions, sur le papier, la proportionnelle intégrale semble la proposition la plus démocratique. Miroir aux alouettes, attrape-nigauds. La revendication de proportionnelle intégrale à toutes les élections risque de rendre ingouvernables les institutions. C’est précisément de cette instabilité qu’est née la 5ème République sur les lambeaux de la 4ème. Le fascisme y fait régulièrement son nid. Les excès tuent et celui de démocratisme proportionnaliste tue la démocratie en bloquant le processus de gouvernement.
La première erreur ou intention malsaine consiste, sous le fallacieux prétexte de représenter les minorités parfaitement, de préconiser la proportionnelle intégrale. Les minorités sont bien représentées mais le pays est le plus souvent ingouvernable et la crise politique permanente devient crise de régime, blocage et boulevard pour l’établissement d’un pouvoir fort c’est à dire de la sortie de la démocratie au bénéfice d’une démocrature voire d’une dictature sans fard.
Ce serait renverser la 5ème République pour risquer l’instabilité gouvernementale de la 4ème République.
La proportionnelle intégrale entraîne la démocratie référendaire puisque les contre pouvoirs et les échelons intermédiaires sont affaiblis, ignorés, court-circuités.
On comprend bien l’intérêt pour les deux extrêmes de rendre le pays ingouvernable jusqu’à ce qu’un État fort vienne y mettre bon ordre nouveau. La proportionnelle intégrale et sa difficulté à obtenir des majorités stables produisent le chantage des petits groupes qui se vendent au plus offrant et font et défont les majorités à leur guise, provoquent une coalition hétéroclite qui va de compromis en compromissions permanentes, consensus mou, « combinaziones » sans fin, voire blocage et boulevard offert à un régime fort pour s’en sortir. Ces groupes, entourloupe, voulant renverser la démocratie trouvent là un chemin qui les fait paraître très démocrates.
Le RN est chaud partisan de cette proportionnelle intégrale. Les exemples de la République de Weimar et du fascisme, l’histoire permanente de l’Italie, la toute dernière alliance de Syriza avec un petit groupe nationaliste, Israël, l’Espagne, l’Italie et toute notre histoire de la 4ème République où les gouvernements ne duraient que quelques semaines et parfois quelques jours, nous éclairent. 4ème République qui a offert une voie royale, monarchique, au coup d’État et à la prise du pouvoir par de Gaulle en 58, au pouvoir personnel, puis à la monarchie républicaine devenue présidentialiste d’aujourd’hui.
Les Verts eux, parés d’un vernis libertaire, par utopie ou par naïveté politique, préconisent également ce système extrémiste qu’est la proportionnelle intégrale. Par immaturité, démocratisme primaire qui voit des élus bisounours formant à chaque fois des majorités d’idées. Ils n’envisagent pas les tempêtes et les crises et ne retiennent pas les leçons de l’Histoire.
PS, LR et LREM ont ainsi beau jeu de brandir le risque du proportionnalisme pratiqué dans son intégralité pour conserver leur système inique. De mauvaise foi, ils refusent d’envisager la proportionnelle à correctif majoritaire ou, pervers, ils préconisent une « dose » de proportionnelle.
Notre passé, en particulier la 4ème République, les expériences des européens, italiens et espagnols en particulier, ou des israéliens, notre culture monarchiste majoritaire immature et non préparée à la culture de compromis, la division de notre société, sa fracture sociale et politique et ses inégalités, la force des populistes, ne nous permettent pas, dans un premier temps, de passer à une proportionnelle intégrale même si la question reste posée. Si tant est que nous le souhaitions, nous ne pouvons prendre ce haut risque d’instabilité et il nous faut un long apprentissage. Qui plus est le fait de conférer à la plus forte minorité une capacité majoritaire est peut-être bien plus démocratique et susceptible de favoriser les alternances plutôt que les majorités mouvantes de la proportionnelle intégrale qui risque de toujours prendre les mêmes et de recommencer pour finir en « combinaziones ».
Il convient de revendiquer la proportionnelle paritaire la plus intégrale et la plus forte possible, mais avec correctif majoritaire, sorte de prime au gagnant sous forme de second tour majoritaire garantissant une majorité à la plus forte coalition même minoritaire.

Le scrutin mixte, 400 sièges, paritaire femmes-hommes.
Premier tour proportionnel intégral à 80% = 320 sièges, (moins les sièges accordés au prorata des blancs),
Second tour majoritaire à 20% = 80 sièges.

1er tour : 320 sièges à la proportionnelle intégrale :
160 élus à la proportionnelle intégrale sur listes paritaires régionales.
160 élus à la proportionnelle intégrale sur listes paritaires nationales.

Deuxième tour, correctif majoritaire :
80 sièges paritaires attribués à la liste arrivée en tête du second tour de scrutin de listes après fusion des listes entre les deux tours. Trois semaines entre les deux tours garantissant l’existence d’une majorité dans l’hémicycle, favorisant les listes capables de s’allier au deuxième tour et pénalisant les extrêmes peu capables de passer des alliances. Toutes les listes ayant participé au scrutin proportionnel de listes peuvent fusionner entre les deux tours si elles ont obtenu au moins 2% des suffrages.
C’est l’électeur qui choisit la coalition gagnante et son programme de gouvernement qu’il voit se composer entre les deux tours. Les alliances se font sous ses yeux entre les deux tours. Avec la proportionnelle intégrale les alliances se font dans le dos de l’électeur, après l’élection et souvent de façon surprenante, au plus offrant. C’est ainsi que l’on voit Cinq Étoiles en Italie nouer une alliance contre nature avec l’extrême droite puis la rompre et passer une alliance avec la gauche !

La farce de la « dose de proportionnelle »
Nombreux sont les systèmes majoritaires introduisant, « distillant » une dose de proportionnelle. Ce sont les plus pervers puisqu’il s’agit de faire semblent de représenter les minorités, de leur accorder des miettes dans la limite où il s’agit de les contenir dans une représentation artificielle et médiatique mais sans possibilité d’accéder au pouvoir.

Majorité ou plus forte minorité ?
La remise en cause du concept de « majorité » et son remplacement par celui de « plus forte minorité » avec concession majoritaire pour gouvernabilité.
La chose politique, organisation de la cité, pays, région, commune, devient gouvernable sans crise, sans compromission, sans petits groupes faisant la pluie et le beau temps, c’est dire sans chantage politique. L’exercice du pouvoir par la plus forte minorité est lisible et facilitée. Cette « plus forte minorité » n’est pas considérée comme la majorité ce qui la rend humble et attentive.
Les minorités et sensibilités s’expriment aisément et en ont les moyens, en particulier celui de remplacer la plus forte minorité qui gouverne à la prochaine échéance électorale. L’alternance est facilitée même si elle n’est pas automatique. Elle permet à une minorité de devenir la plus forte minorité, de gouverner avec des moyens majoritaires.
Égalité maximale des chances dans la compétition électorale, stabilité gouvernementale et maximum de représentation politique des minorités dans les assemblées.

Le second tour majoritaire, prix de la gouvernabilité, garantit la majorité, preuve que la pensée libertaire peut être une pensée de gouvernement. C’est que nous sommes et démocrates et républicains et que nous nous en donnons les moyens tout en en payant le prix. Nous sommes opportunistes, cyniques, pragmatiques et conséquencialistes si nous voulons bien nous donner la peine de redonner à ces mots leur vrai sens philosophique hors politique politicienne. Esprits libres, n’ayant pas peur des mots et de leur signification.
Cette concession de notre part ne bénéficie pas à n’importe qui. Elle avantage la liste arrivée en tête à l’issue du second tour d’un scrutin de liste et défavorise les extrêmes. Nous savons combien la servitude volontaire est ancrée, combien les Esprits Libres ne seront pas forcément et en permanence en charge du gouvernement. Il convient donc de faire en sorte que cette concession soit sous un régime de « légalisation contrôlée », que cette concession ne fasse pas l’objet d’abus et surtout que l’alternance, la possibilité de changer facilement le groupe gouvernemental pour un autre, soit facilitée en tout. En un mot, nous concédons la gouvernabilité contre la facilité des alternances.

Fonctionnement des assemblées : en finir avec la délégation de vote
« La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote. Dans ce cas nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat ». Or, loin d’être exceptionnelle, la délégation est devenue la règle à l’Assemblée. Pour la plupart des votes, les présents sont porteurs d’une délégation. 50 présents à la séance pour 100 votants. Au Sénat c’est la délégation de groupe, non constitutionnelle, qui est pratiquée, un élu vote pour tout son groupe.
La délégation cache l’absentéisme et favorise le cumul des mandats. Aujourd’hui le nom des votants n’est pas public. Supprimons la délégation de vote. Seuls les présents votent. Le nom des votants est public et l’absence dans l’hémicycle entraîne une retenue sur salaire.