Lettre ouverte au ministre, M. Pap Ndiaye : Soutien à Hanane Ameqrane

Lettre ouverte au ministre, M. Pap Ndiaye : Soutien à Hanane Ameqrane

Lancée le
16 mai 2023
Adressée à
Pap Ndiaye (Ministre de l' Education Nationale et de la jeunesse)
Signatures : 1 183Prochain objectif : 1 500
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Pourquoi cette pétition est importante

En ce jour du 17 mai, Journée Mondiale de Lutte contre les LGBTQIphobies, plus de 70 organisations, personnalités et militant.e.x.s lancent une alerte sur Médiapart sur la souffrance au travail de Hanane Ameqrane, enseignante au lycée Angela Davis. Son histoire est un mélange alarmant de risque psychosocial, de vexations de la hiérarchie, de répression syndicale, de harcèlement intersectionnel.

Pour venir en aide concrète à Hanane et sa famille  : Collecte solidaire en ligne

Hanane Ameqrane est syndicaliste, une militante féministe et antiraciste, maman lesbienne de l’immigration et des banlieues, engagée dans un processus PMA.  Elle travaille au lycée Angela Davis.  Son histoire est un mélange alarmant de risque psychosocial, de vexations de la hiérarchie, de répression syndicale, de harcèlement intersectionnel. Nous lui apportons tout notre soutien : nous la croyons.

Depuis des mois, Hanane vit une souffrance au travail intense. 

  • Le 22 novembre 2022, suite à une altercation provoquée par une collègue au sein du CDI, Hanane est convoquée par la direction une semaine plus tard. Cet entretien a duré 5 heures, de 10h30 à 15h30, sans pauses, sans repas, sans accéder aux requêtes répétées de report et de changement de témoin.
  • Pourtant, la direction avait tous les derniers éléments de santé la concernant : certificat de passage aux urgences lié au stress de la situation et hospitalisation programmée de longue date quelques jours après, pour des soins liés à la PMA.
  • A son retour d'hospitalisation en janvier 2023, la situation n’a fait que dégénérer au sein du lycée et avec la direction. Hanane envoie une lettre exprimant ses pensées suicidaires liées à la souffrance au travail le 14 février 2023. Aucun accompagnement spécifique ne lui a été proposé.
  • Lors d'un entretien téléphonique RH le 3 mars 2023, Hanane et SUD Education 93 demandent une médiation avec sa direction, un rendez-vous rapide avec la médecine de prévention,  espérant que cesse cet acharnement et finir l'année scolaire.
  • Le 10 mars 2023, Hanane quitte le lycée, au bout d'une heure de travail,  accompagnée et sécurisée par deux membres de sa famille. Quelques minutes avant son départ, après de nouvelles vexations, Hanane décompense psychiquement. Elle finit par être évacuée par les pompiers.  Deux jours plus tard, elle débute  un séjour de cinq semaines en hôpital psychiatrique.

L'acharnement ne s'arrête pas là. 

  • Le 24 avril 2023, Hanane vient chercher ses affaires au CDI, pendant les permanences administratives des vacances. La direction arrive brusquement au CDI. Sans prendre des nouvelles sur sa santé, ou tenir compte de la présence de sa fille de 4 ans, la direction insiste pour qu’elle signe un document. Hanane demande une convocation ou un courrier recommandé, afin de préserver sa fille et d’être accompagnée syndicalement.
  • Malgré ses demandes, la direction insiste plusieurs fois pour lui faire signer une “interdiction d’accès à titre conservatoire” valable 1 mois. Dans ces conditions, Hanane refuse de signer le document, prend une partie de ses affaires sous la surveillance de la direction et part avec sa fille, choquée de la scène.
  • La direction a décidé d'appliquer l'article 421.12 du code de l'éducation sans donner de motifs :  “S'il y a urgence, et notamment en cas de menace ou d'action contre l'ordre dans (...) l'établissement, le chef d'établissement peut :  Interdire l'accès de ces enceintes ou locaux à toute personne relevant ou non de l'établissement”
  • Vendredi 12 mai, Hanane reçoit une convocation des Ressources Humaines pour “signalement de son chef d’établissement”, sans avoir accès aux documents en question. Ce nouveau mail génère de nouveau un stress intense, qui ne font qu'accentuer son épuisement, pendant sa convalescence. 

Nous sommes révolté.e.x.s et ému.e.x.s de ce que Hanane a subi depuis des mois. Ce harcèlement intersectionnel a eu raison de sa santé. Hanane est de plus en mi-temps thérapeutique et considérée comme personnel vulnérable COVID. Son dossier administratif, consulté le 21/04/2023, est vide, prouvant des états de service impeccables. 


Malgré tous ses signalements, Hanane a dû fuir, abandonner les projets portés avec les élèves, le CDI dont elle a fait l’ouverture en 2017 dans des conditions précaires, finir en hospitalisation psychiatrique loin de sa famille. Cette succession de violences, a porté gravement atteinte à son intégrité physique et psychique, son éthique professionnelle et syndicale.

Pourtant M. Le Ministre, comme nous pouvons le lire sur le site de votre ministère : “l’employeur public est garant de la santé, du bien-être et de la sécurité au travail de ses agents.”

La souffrance au travail, le harcèlement, les méthodes de management brutales, les réformes impopulaires en cours, mènent aux suicides des personnels. Le Ministère doit aujourd’hui prendre ses responsabilités sur la dégradation des conditions de travail des personnels et les risques psychosociaux auxquels iels sont exposé.e.s, seule condition pour prévenir l’épuisement professionnel et les actes suicidaires.

Nous soutenons les revendications de Hanane et ses proches : 

  • Annulation immédiate de l’interdiction d’entrer dans l’établissement
  • Réactivation de son accès à l’Espace Numérique De Travail
    Arrêt immédiat de toutes les procédures conservatoires et disciplinaires
  • Mise à disposition des documents sur les signalements et faits reprochés avant sa convocation au Rectorat
  • Mise à disposition immédiate du rapport complet de la Mission Générale d' Inspection du lycée de 2019/2020
  • Reconnaissance de l’imputabilité de ses accidents du travail. Nous refusons que l’administration la rende responsable de cette souffrance :  c’est le travail qui a abimé Hanane.
  • Prise en charge de tous les soins nécessaires à sa réparation
  • Accompagnement de Hanane pour la suite de sa carrière.
  • Annulation de toutes les procédures de répression en cours: solidarité avec tou.te.s les victimes 

Hanane et le lycée Angela Davis

Hanane Ameqrane, militante syndicale, féministe antiraciste, et le lycée Angela Davis n’ont pas été choisis au hasard. Le lycée est un bastion syndical, en première ligne des mobilisations sociales depuis des années.  Ce lycée, tout comme le lycée Joliot Curie de Nanterre, a déjà été ciblé par le précédent ministre, Jean-Michel Blanquer suite à un article de L’Express mensonger, pointant du doigt ces deux établissements.
Une mission générale d'inspection 360° a été  diligentée au lycée en 2019/2020. Le résultat de cette inspection n'a jamais été communiqué, malgré les demandes des personnels. Suite à cela, une nouvelle direction a été nommée au lycée. Celle-ci est, bien connue pour ses méthodes de répression des syndicalistes  . Depuis, les conditions de travail se sont fortement dégradées :  convocations, rapports, collègues blâmé.e.s, souffrance au travail, ambiance délétère au sein des équipes …

Cette mission générale a eu une attention particulière sur les projets du Centre de Documentation et d’Information, dans lequel travaille Hanane. Les inspecteurs généraux ont convoqué Hanane et sa collègue le 15/12/2019. Iels les ont questionné sur le syndicalisme au lycée, la laïcité et les élèves voilées, mais aussi leurs projets : rencontres et travail d'expression médiatique sur le thème des violences policières, les affichages jugés trop féministes du CDI, la valorisation de la culture des banlieues des élèves, l’ expression de ces dernier.e.s jugée trop libre dans le cadre des clubs. Pourtant, tous les projets du CDI sont validés par la hiérarchie. Certains ont même obtenu des prix académiques et départementaux. 

L'intersectionnalité n'est plus une option dans l’Education Nationale.

L’institution ne peut pas nier la spécificité liée à l' identité multiple et intersectionnelle de Hanane. 

Tout est fait pour disqualifier sa parole et ses souffrances. En la taxant de “menace”, de “trouble”, en alimentant des rumeurs sur sa santé mentale, en ne tenant pas compte de son mi temps thérapeutique, en la rendant responsable de toutes les violences qu’elle a subies : l’institution s’innocente de ses responsabilités. C’est ce qu’on appelle l'inversion de la charge sur la victime. 

Hanane a pourtant toujours alerté, dénoncé et cherché du soutien. Elle subit depuis le cliché de la femme, lesbienne, racisée “en colère”,  “folle”, “fragile”, “émotive”, "caractérielle". Sa souffrance ne serait pas liée au travail, mais à ses pathologies. De fait, sa parole est délégitimée : on ne lui reproche pas ce qu’elle fait, mais ce qu’elle est. L’empathie, la solidarité finissent par disparaître. Son histoire est celle de la majorité des femmes et/ou LGBTQI+ racisé.e.s au travail. 

Malgré la situation, Hanane reste lucide sur ce qu'il se joue et tient à rendre publique sa narration, malgré la peur et l'épuisement : “Je ne suis pas sortie du placard en tant que lesbienne racisée des quartiers populaires, pour me faire placardiser au travail” confie-t-elle avec émotions.

En ce jour du 17 mai, nous tenons à vous alerter sur la souffrance spécifique des personnels et élèves LGBTQI+

Comme vous l’avez vous même exprimé le 12 janvier 2023, suite au suicide du jeune Lucas, victime de harcèlement au collège “L’orientation sexuelle est souvent un point d’appui des auteurs de harcèlement, comme l’apparence physique, l’origine, la condition sociale”.

Les suicides liés au harcèlement à l'école, notamment chez les jeunes LGBTQI+ comme Dinah, Lucas, Fouad et tant d’autres, ne peuvent plus être mis au placard. Il est temps que L’Education Nationale prenne ses responsabilités, et entendent les victimes et leurs familles. 

Tout comme Hanane, les victimes ont parlé et alerté sur leur situation, avant que leur santé mentale ne se dégrade, conduisant certain.e.s au geste fatal. 

Hanane Ameqrane est un atout pour les élèves, non une menace. 

Elle n’a jamais cherché à avoir de médaille, ni promotion : elle est bien avec les élèves, dans le CDI.  “Mon salaire est le sourire, la réussite et le bien être des élèves” nous dit-elle avec humilité. 

Les élèves souffrent d’avoir perdu ce repère, mais iels ont exprimé à Hanane plus d’empathie que l’institution. Ce message reçu par Hanane en pleine hospitalisation, d’une élève, aidée de sa maman, nous prouve une nouvelle fois son engagement  :

“Je tenais à vous remercier pour tout ce que vous avez fait pour notre lycée. Je voulais vous dire que j'ai adoré les activités que vous avez organisées, en particulier les karaokés et les événements pour la communauté LGBT et contre le sexisme. En tant que jeune femme issue de la communauté LGBT, je sais à quel point il est important d'avoir des adultes de confiance dans notre environnement pour se sentir en sécurité et accepté. Vous avez été cet adulte pour moi et pour beaucoup d'autres élèves, et je vous en suis très reconnaissante.
Vous avez su créer un environnement accueillant pour tous les élèves et nous avons été chanceux de vous avoir à nos côtés.
Je vous souhaite le meilleur pour votre avenir et je vous remercie encore pour tout ce que vous avez fait pour notre lycée."

Hanane devrait être aux côtés de ses collègues et des élèves. Aujourd'hui se tient au lycée l'annuelle Fête des talents, projet qu'elle a co-initié et co-organisé en juin 2019 et 2022.

Faisons des vagues 

Nous dénonçons cet acharnement contre une syndicaliste, féministe et antiraciste, une maman lesbienne racisée des quartiers populaires. 

Nous ne pouvons tolérer l’argument utilisé dans chaque cas de répression :  “l’intérêt du service”. L’intérêt n’est jamais celui des élèves ou des personnels en souffrance, mais celui de la hiérarchie, pour se débarrasser des personnes prêtes à pointer du doigt toutes ses dérives. 

Nous ne pouvons tolérer que Hanane soit sacrifiée et nous ferons donc des vagues :  son histoire est un mélange alarmant de risque psychosocial, de répression syndicale et de harcèlement intersectionnel. 

Monsieur le Ministre, accepter cette situation, c'est mettre en danger les usager.e.x.s, les plus fragiles, de l'Education Nationale.

Comité de soutien à Hanane Ameqrane

soutienhananeameqrane@gmail.com
@comitesoutien_hananeameqrane

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Décisionnaires

  • Pap NdiayeMinistre de l' Education Nationale et de la jeunesse