Vient de paraître : chronique littéraire « 135 ans et + » (Marcel Yabili)

Depuis que l’histoire coloniale et les horreurs belges au Congo ont été mises au-devant de la scène, ils ne la quittent plus. C’est à se demander si le Congo n’existe que par un segment de son bref passé avec la Belgique.

En effet, chaque 30 juin, la Belgique commémore, non pas l’indépendance du Congo, mais les 52 années de « son » Congo (belge). Pourtant, en 2020, les dirigeants congolais avaient fait un bilan positif de la colonisation. Et, il y a cinquante ans, Mobutu avait proclamé que « c’est une erreur impardonnable de ressasser le colonialisme plutôt que de penser et de construire le présent et l’avenir ».

C’est pour en finir avec des histoires épouvantables et indignes, qu’ un Congolais de la RD Congo écrit une trilogie « Le roi génial et bâtisseur de Lumumba ». Il a ainsi révélé les fake news (Tome1) et organisé un tribunal (Tome 2) sur Léopold II. Le troisième volume est consacré à 135 ans d’hommes désireux et dignes de droits fondamentaux et de vraies histoires, surprenantes et souvent agréables.

L’auteur avait été consulté par la Commission parlementaire chargée du passé colonial : « Il y a des choses claires et dépourvues de doute. J’ai demandé qu’on cesse de parler de génocide et d’enrichissement personnel de Léopold II qu’on ne peut confondre avec l’État congolais. J’ai aussi trouvé inexact de mélanger le Congo avec les nouveaux venus et les petits Rwanda et Burundi. Surtout, j’ai exprimé mon indignation à ce que l’histoire de mon pays soit décidée par un vote de députés belges ».

Actuellement, le magazine « Le Vif » consacre un numéro spécial de 180 pages au Colonialisme : de l’oeuvre civilisatrice à l’heure des comptes.
« A-t-on jamais imaginé l’Angleterre commémorant sa colonisation violente des États-Unis d’Amérique ? Ou l’Allemagne, ses deux colonisations meurtrières et prédatrices de la Belgique lors des deux guerres mondiales ? » s’étonne l’auteur.

« Le choix éditorial et les discours belges sur l’ancienne colonie ne sont pas innocents. D’une part, si le Congo prospérait comme il le mériterait, personne n’aurait osé l’insulte de parler du temps colonial. Finalement, la véritable question n’est pas le passé, mais la gouvernance et le vécu quotidien au Congo même. D’autre part, on recherche les vexations et les humiliations qu’ont subies les Congolais en stigmatisant une malveillance du passé du Blanc, mais une infériorité encore actuelle du Noir. Cette mise en scène de Congolais dégradés et marqués au fer par le Belge est sans conteste de l’apologie du racisme ».

L’auteur livre un exemple du jour. La RTBF a annoncé avec fracas que « les œuvres d’art pillées par la Belgique seront restituées à la RDC ». Il s’agit, en fait, de seulement 0,3% des pièces qui se trouvent au musée de Tervuren, soient 283 sur 85.000 objets. Dans cette affaire, il est impossible d’annoncer la vérité, à savoir que 99,7% des œuvres congolaises à Tervuren n’ont pas été pillées. Mais la RTBF a choisi délibérément d’exprimer l’humiliation et la victimisation des Congolais pour moins que rien. L’auteur se veut plus précis.

« La vérité sur le Congo est une question d’honnêteté. On ne s’est jamais penché sur les Congolais. Le hasard de la différence de peaux montre qu’un raciste se contente de regarder des ombres noires, sans jamais voir des êtres humains et leurs personnalités. En Europe, on regarde le plus grand crime imputé à Léopold II, celui d’avoir fait « travailler » les Congolais, mais on ne voit pas que les Congolais ont mis le « travail » dans leur devise, la même qu’au temps de Léopold II. Les Congolais sont des léopoldiens qui se sont approprié des frontières négociées par Léopold II ; ils n’acceptent pas la balkanisation du pays. Etc. »

Le livre est particulier. L’abondance d’informations inédites et précises se lisent comme un roman. Car tout en parlant du passé lointain, l’ auteur rapporte au fur et à mesure ce qu’il vit en temps réel. Tout se mélange et on dispose pour la première fois de clefs de lecture de l’histoire du Congo sur « 135 ans et + ».

Ce n’est pas un livre d’histoire ; c’est un thriller ! On débute avec les affabulations sur les humiliations pour apprécier comment le vrai Congo pourrait être raconté. On finit par découvrir que le drame de ce grand pays est de n’avoir toujours pas eu la véritable indépendance ! Celle que la colonisation elle-même ne pouvait lui transmettre…

Marcel Yabili, Le roi de Lumumba (T3) 135 ans et+, Mediaspaul, 2021 336 p, 22€ ;

Le roi de Lumumba (T1) FAKE NEWS, Mediaspaul, 2020, 272 p, 20,52€ ; Mijn waarheid over Léopold II, Musée familial Yabili, 2020, 272 p, 21,65€

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